Dimanche 06 octobre 2002, Bar Crocodillo, San Cristobal de Las Casas

« Nous ne cherchons pas à obtenir le prix Nobel de la paix ou à faire monter le prix des passes montagnes, nous voulons que soient reconnus les droits des Indiens »

Sous commandant Marcos, Février 2001


Ah, qu’il fait bon dormir ! Pour une fois, nous nous sommes accordés un petit repos réparateur. Ce n’est qu’à 9h30 que nous quittons la capitale du Chiapas pour San Cristobal de Las Casas. La route qui y conduit semble tutoyer les nuages. Heureusement, elle est plus roulante que celle qui mène de Villahermosa à Tuxtla. En 1h30, nous serons rendus. Le ciel est bas et menaçant en cette matinée. Nous prenons nos quartiers à l’hôtel Casa Vieija, ancienne demeure coloniale avantageusement transformée en hôtel. C’est très coquet et plein de charme. Ici, le climat est différent : il fait une bonne dizaine de degrés de moins que dans la plaine ! Le thermomètre indique précisément 17° lors de notre installation.

Aujourd’hui dimanche, jour de marché, des indiens Totzils et Tetzales sont descendus des villages avoisinant pour vendre leurs marchandises. Nous déambulons dans les allées hautes en couleurs du mercado municipal, émerveillés par les étals multicolores proposés par les commerçants. Mais ici, pas moyen de prendre des photos. Les indiens en ont une sainte horreur ayant l’impression qu’on leur vole leur âme. L’appareil restera donc au fond du sac. Après cette visite, nous faisons le tour du carrefour Santo Domingo et de sa superbe façade pittoresque. Les indiens venus de San Juan Chamula y vendent quotidiennement les fruits de leur artisanat. Puis, nous déambulons à loisir dans les rues de la charmante ville coloniale. Il est l’heure de déjeuner. La taqueria « Emiliano’s moustache » sera notre cible. Dans un cadre charmant, nous dégustons de délicieux tacos mixtes et des quesadilla burrita de premier choix. En sortant, nous prenons un café dans une coopérative au concept particulier permettant de minimiser les intermédiaires et d’augmenter les bénéfices reversés aux producteurs indiens. Alors que nous sommes installés dans l’agréable cour intérieure, une fine bruine s’abat sur la ville.

De retour à l’hôtel, j’enfile une chemise plus épaisse avant de reprendre la route. Après avoir retiré quelques pesos, nous visitons à l’extrême est de la ville la maison « Na Bolom », littéralement « la maison du jaguar » en langue Totzil. Cette ancienne demeure coloniale fut celle de Frans Blom et de sa femme, deux archéologues passionnés par le Chiapas et qui dédièrent leur vie à la protection des indiens Lacandons et de leur culture. La visite guidée s’avérera intéressante en plusieurs points. D’une part, l’endroit est esthétiquement fort coquet, d’autre part, nous apprenons beaucoup de choses sur les peuples du Chiapas, notamment sur les indiens Lacandons qui habitent les forêts humides du sud de l’état. Ce sont les seuls à ne pas avoir été influencés par les modes de vie et la culture espagnole car leur lieu de résidence est très reculé et trop difficilement vivable. La famille Blom s’est battue pour préserver la culture Lacandon et « Na bolom » est devenue un refuge pour les indiens malades ou souhaitant simplement un couvert et un logis. Ils sont reconnaissables à leur longue chevelure d’ébène et à leur tunique blanche. Nous en croiserons quelques uns dans la cour de la maison. Curieux destin que ce peuple. Aujourd’hui, leur habitat est menacé par la déforestation intensive, leur culture par la construction de routes. L’association mexicaine, qui a repris la maison à la mort des époux Blom, a pour but d’une part de venir en aide aux indiens, mais aussi de sensibiliser l’opinion publique sur ces sujets. Il est 18h, nous retournons vers le centre ville. Sur le zocalo, nous entrons dans le bar Crocodillo, l’un des repères de la communauté bohème qui s’est installée à San Cristobal. En écrivant ces quelques lignes, je siffle une Pinà Coladà agrémentée de rhum. Nous repassons à l’hôtel avant d’aller dîner vers 21h au restaurant Yulca : pollo a la mexicana et guacamole. Le poulet du Chiapas à la cuisse ferme ! Dans notre romantique chambre, nous assistons au final d’un match NFL. La culture américaine est omniprésente dans les médias mexicains.

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