02/10/2001, Shwe Pyi Mae Cafe, Mandalay

« Il serait difficile de trouver des gens qui acceptent avec plus de franchise et de bonne humeur que les birmans leurs imperfections et leurs échecs »

Norman Lewis, Terres d’Or


7h30 du matin , la berline japonaise du chauffeur de taxi attend devant l’entrée principale de l’hôtel. Nous nous y engouffrons, les yeux pleins de sommeil. Pour une fois, il n’a pas trop plu cette nuit mais le ciel est encore couvert de menaçants nuages. Nous parcourons les routes poussiéreuses qui traversent les faubourgs de Mandalay. De temps à autres, les villageois ont dressés des barrages aux portes de leur bourgades afin de prélever une petite taxe. Notre chauffeur s’en acquitte sans s’arrêter, balançant par la fenêtre une poignée de Kyats.

Pyin U Lwin est une station d’altitude qui doit sa célébrité à son climat, bien plus frais que la touffeur qui emplie de la plaine. Depuis la fin du XIXème siècle, les employés de l’Indian Burma Trading Co venaient s’y ressourcer dans une ambiance très « British ». Le général May, commandant en chef du 5éme régiment d’infanterie du Bengale y avait fait son lieu de villégiature, d’ou le surnom de la ville qui lui reste encore collée à la peau aujourd’hui : Maymyo, la ville de May. La clémence de son climat et son passé britannique fait de la région l’une des plus fleurie de Birmanie. On y trouve des fleurs caractéristiques des jardins anglais : Bégonias, Dahlias ... Le coin est également fort réputé pour la qualité de ses ... fraises ! Il paraît qu’elles sont excellentes en Janvier Février : on croit rêver ... Confortablement installés à l’arrière de la Toyota climatisée, nous avalons les sinueux lacets qui mènent à la station.

La visite de Maymyo débutera vers 9h. Nous déambulons dans le pittoresque marché de plein air où l’on vend fruits, légumes et poissons. C’est toujours aussi pittoresque. Nous faisons un crochet jusqu'à la Purcell Tower, cadeau de la reine mère et piètre imitation de Big Ben. Là, je suis abordé par Kumar, jeune homme d’origine Bangladeshi dont le grand père à servi dans l’armée britannique. Sa famille tient désormais une boutique d’artisanat. Mais les affaires ne marchent pas trop ces temps-ci : « Few tourists, Few tourists » me glisse-t-il , dépité que je refuse de faire un détour par l’échoppe familiale. A notre grande surprise, la température est vraiment agréable. Ici à Maymyo, il doit faire aux environs de 25°C et les locaux portent des petites laines et des bonnets.

Une fois le centre ville arpenté, nous reprenons le taxi pour le jardin botanique. L’espace paysager y est agréablement agencé et bien que l’entrée soit un peu chère (1000 Ks), nous passons un agréable moment au milieu des fleurs (pas exotiques du tout ...) et des arbres à essence. Au fond du parc, dans une petite volière s’entassent tristement des espèces rares de volatiles. Dans une immenses cage, une colonies de pans font la roues pour impressionner les femelles. Au cœur d’une petite fermette, nous avons la surprise de découvrir des espèces de poules et de pigeons inconnues dans nos contrées. Ils ont un duvet très épais, on dirait des volatiles angoras. En ce jour de pleine lune, la journée est chaumée et les birmans sont nombreux à profiter de la quiétude de l’endroit pour pique-niquer.

Après avoir terminé la visite, nous demandons au chauffeur de nous déposer à l’hôtel Candarcraig, pension hors du temps, existant depuis 1904 et très prisée à l’époque par les employés de L’Indian Burma Trading Co. On dirait un vieux manoir anglais perdu dans la montagne birmane. C’est vraiment désuet et il n’y a pas un client. Ce doit être amusant de passer une nuit ici. Il est désormais l’heure de déjeuner et cela tombe bien car le temps se gâte. Nous atterrissons au restaurant Aung Padamya, spécialisé dans la cuisine de l’Inde du Sud, et situé non loin du marché Shan. Nous prenons un curry de poulet et un curry végétarien. Le tout est très épicé comme toutes les spécialités du sous-continent, mais cela se mange bien … Dehors, la pluie a commencée à tomber et notre chauffeur, allongé dans la boue, se débat avec une roue crevée.

Etant donné le temps, nous renonçons à la ballade sensée nous mener à de majestueuses chutes d’eau et retournons sous la pluie vers Mandalay. Aussitôt les spectaculaires lacets de route montagneuse effacés, la température remonte fortement. Avant de rentrer à l’hôtel, nous demandons au chauffeur de faire un crochet par le monastère de Shwe In Bin, véritable chef d’œuvre de bois encore utilisé aujourd’hui par une communauté de bonzes. Je suis bluffé par la réalisation et la finesse des détails. Alors que nous montons à l’étage du bâtiment, nous pouvons observer les moines étudier en silence dans la pénombre tandis qu’au loin retentissent les incantations d’un groupe de novices.

Après un court repos à l’hôtel, nous tentons une seconde fois notre chance à la poste centrale sans plus de succès : elle est encore fermée ! Soit, de dépit, nous achetons des timbres à une échoppe et déposons 3 lettres dans une grande boîte rouge couverte d’inscriptions en birman. Si elles arrivent un jour, je mords un chien (J’aurais mieux fait de me taire car l’une d’entre elle arrivera à bon port ...). Nous profitons de la proximité de notre maison de thé préférée pour y faire une dernière halte et déguster ses fameux Nam Bya (sorte de galettes au beurre et au sucre). Alors que nous regardons tranquillement nos photos, fraîchement développées, un attroupement s’est formé à notre table et tout le monde commente à haute voie nos images de Bagan .... Idem lorsque je sortirais mon carnet de note. Les très jeunes serveurs qui travaillent dans l’établissement semblent comme fascinés par ces pages noircies d’une étrange écriture et ils ne me quittent pas des yeux ! Puis nous nous enfonçons dans la ville et ses rues poussiéreuses. Je m’adresse sans succès aux boutiques du centre pour trouver de l’alcool à 90° ou autres désinfectants. Mais j’ai énormément de mal à me faire comprendre.

Après avoir errés plus d’une heure au hasard des rues à la recherche de deux restaurants préconisés par notre guide LP mais visiblement fermés depuis, nous finissons chez Mann, un bon chinois très couleur locale où nous prenons un dîner à base de crevettes frites. Le tout copieusement arrosé de Myanma Beer... De retour à l’hôtel, nous regardons à la télé chinoise en direct de l’Albert Hall de Londres, une émouvante interprétation de l’adagio pour violon d’Albinoni joué en mémoire des disparus du 11 Septembre. Demain, départ pour Heho et le plateau Shan !


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