« Quel forum antique à jamais présenté une telle agglomération d’édifices, si variés de forme, si riches d’objets précieux ? Quel cité même, quelle capitale des états européens pourrait offrir une telle nomenclature »

Jules Vernes, Les tribulations d’un chinois en Chine


Nous nous apprêtons à prendre notre petit déjeuner et le ciel est toujours aussi chargé. Changement de programme : nous irons finalement au Palais d’été au lieu de la Cité interdite, espérant pouvoir nous y rendre sous de meilleurs auspices avant la fin de semaine. Mal nous en a pris car à peine mettons nous le nez dehors qu’une fine pluie commence à tomber. Elle ne cessera pas de la journée !

Nous nous engouffrons dans un taxi, direction Yihe Yuan, le palais d’été. Embarqués à bord d’une frêle japonaise cabossée, nous essayons de nous frayer un chemin à travers la dense circulation de ce lundi matin. Douze km et 42 Yuans plus loin, nous arrivons devant l’entrée principale du palais. Sur le parvis, à côté des deux lions en bronze qui gardent l’accès au palais, un étrange ballet de casquettes multicolores se joue sous nos yeux. Chaque groupe de touristes chinois s’agite dans son coin avec sa propre logique alors que la pluie redouble d’intensité. Vue les conditions météorologiques, des petits malins réussissent à nous vendre un parapluie bon marché et les panchos en plastique multicolores font fureur. Nous passons la matinée à visiter ce palais aux dimensions fantasques, sorte de Versailles à la chinoise.

Le palais s’étend au tour du Lac Kumming, énorme étendue artificielle d’eau, dominée par la colline de la longévité d’où s’élève le temple principal. Au milieu du lac, un petit îlot est relié à la terre par un étrange pont de pierre, orné d’une multitude de statues de lions. Non loin de la barge de marbre ou se tenaient de somptueux baquets, une longue galerie extérieure minutieusement ornée de fines peintures relie les jardins d’ornement de l’impératrice Cixi au cœur du palais. Plusieurs pavillons aux noms évocateurs se succèdent : Palais des vagues de jade, de la joie et de la longévité, des nuages ordonnés. Au coeur du jardin de l’harmonie vertueuse, juste en face du théâtre ou sévissait une troupe d’eunuques, nous nous grimons en habits impériaux et posons dans un décor d’époque. Il faut bien essayer de conjurer les éléments naturels. Mais, la pluie et le vent nous ramènent à la réalité. Il fait froid, nous sommes trempés et il se fait tard. Pour éviter de tomber malade (peine perdue pour Laure qui écopera d’un bon rhume), il est plus raisonnable d’écourter la visite et de reprendre un taxi pour l’hôtel. A la sortie du palais, ceux-ci sont légions, mais ils semblent rechigner à mettre le compteur. Nous trouverons finalement un taxi pour nous ramener, mais celui-ci se perdra, volontairement ou non, et le retour s’avérera interminable.

Il est maintenant 15h, nous voici au sec et le temps d’écrire quelques cartes postales, nous nous retrouvons dans la rue à la recherche d’un bureau de poste. Nous entrons dans un grand bâtiment vert qui ressemble à un bâtiment officiel. Là, des employés oisifs semblent dormir au guichet. J’arrive avec mon paquet de lettres, ils n’ont pas un regard pour moi. Je le leur tends en disant « Fagoa ! Fagoa !», pas un regard. Mon mandarin serait-il incompréhensible ? Enfin, une employée daigne se saisir de mes lettres, pianote sur une calculatrice et me présente l’addition : 59,4 Yuans ! Après avoir payé, comme je ne m’en vais pas, elle se sent obligée de tamponner mes lettres une à une à la machine, puis elle les brandit dans ma direction pour me signaler que tout est OK. Ah, enfin un sourire !

Et maintenant, direction Liliuchang afin de récupérer mon sceau. En attendant, j’en profite pour chiner chez les antiquaires voisins à la recherche de reproductions de portraits d’empereurs Qings. Sans succès pour les dimensions que je recherchais. Voilà, je viens de récupérer mon sceau. Nous achetons un petit encrier pour que je puisse l’apposer, et nous reprenons notre chemin à travers les hutongs. Dans un petit marché local, nous craquons pour une galette de riz salée toute chaude. Aux regards surpris des passants, nous devons être les seuls occidentaux à nous être arrêtés dans le coin ! Après quelques minutes de marche, la crêpe nous ayant mis en appétit, nous décidons de dîner dans un barbecue coréen. Au menu, bœuf et poulet mariné, pommes de terre et riz coréen, le tout à faire cuire soi-même sur un mini barbecue, posé sur la table et dont la grille est régulièrement changée par les serveuses. Bon et sympathique, même si très copieux. Demain, réveil à 5h30, le train pour Chengde part à 7h.

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